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Isla Cedros, escale hors du temps

Avons-nous choisi de passer plus d'une semaine dans ce petit port d'une île presque déserte ? Non, pas vraiment. Mais nous ne le regrettons pas.

C'est vrai que nous sommes venus chercher ici un bon abri à l'annonce du mauvais temps qui peut durer un temps indéfini. Pour le reste, nous avons les commentaires enthousiastes d'Albie, tout récemment croisé pendant quelques heures à Bahia Asuncion, c'est peu d'information. À nous de nous faire notre opinion.

Isla Cedros, escale hors du temps
Isla Cedros, escale hors du temps

D'abord, il y a les rencontres. Vale est le premier à nous rendre service. Nous le rencontrons dès mercredi, le premier soir ; il revient de pêche et nous adresse la parole : il parle assez bien anglais, ce qui nous facilite les choses. Nous lui expliquons que nous voudrions acheter de l'eau potable... On n'en trouve pas dans tous les ports à la ronde et ça fait pratiquement six semaines que nous utilisons notre dernier plein. Il en reste encore, mais j'en ai assez du rationnement. À notre grand étonnement, Vale nous explique que dans la montagne (qui culmine à 1200m tout de même) il y a un lac ; un habitant de Cedros a créé sa petite entreprise de captage, filtrage et stockage de cette eau qu'il revend sous le nom d'agua purificada à tous ceux qui en veulent. Tarif : 1,50 Peso mexicain, soit 8 centimes d'Euro le litre. Affaire conclue.

Vendredi nous ne voulons pas quitter l'Alki car Vale nous a dit que c'était le jour du ravitaillement. Les commerçants viennent sur le quai attendre leur commande hebdomadaire. Il y a environ 1300 personnes à nourrir sur l'île, c'est peut-être un assez gros bateau qui vient, et comme le port est tout petit nous craignons de gêner sa manœuvre. Ah oui, eh bien nous aurions pu nous absenter sans inquiétude ! En fait de cargo, nous voyons arriver deux barges d'une dizaine de mètres de long ; elles se rangent facilement l'une derrière l'autre le long du quai. Comment peut-on se contenter de si peu ? Nous sommes piqués par la curiosité et restons à observer le déchargement des marchandises. Il y en aura pour une grande partie de la journée... Pas de palettes, pas de grue : une petite dizaine d'hommes se passent les cartons ou paquets en faisant la chaîne, de la cale au quai et du quai aux camions.

Nous remarquons qu'il n'y a pas de bateaux assurant le transport de passagers. Quelques barques semblent bien parfois emmener trois ou quatre personnes vers Bahia Tortugas, qui n'est qu'un bourg minuscule, en face sur le continent. Mais il y a un petit aéroport au sud de l'île, à El Morro, d'où partent de petits avions en direction d'Ensenada. Ah, tout de même. Ça ne fait rien, c'est vraiment minimaliste comme liaison vers l'extérieur. Une vraie île, quoi.

 

Isla Cedros, escale hors du temps

Nous attendons samedi pour aller faire des courses, espérant que le ravitaillement de la veille sera intéressant. Eh bien, pas de quoi sauter de joie, mais il y a les habituels concombres et avocats, des tomates vertes et, ô surprise ! des brocolis ! Un peu de vert dans nos assiettes, c'est un plaisir rare. Pour la viande, c'est du surgelé, mais nous n'avons pas de gros besoins dans ce domaine.

Nous découvrons davantage le village, en empruntant des ruelles parfois de terre, parfois empierrées de galets. Des plaques rondes indiquent qu'il y a le tout-à-l'égout. Pour le ramassage des ordures, nous supposons que les barils de plastique déposés devant les maisons doivent faire office de poubelles, mais vu la quantité de déchets abandonnés partout, ça doit être un service bien aléatoire. Les maisons sont vraiment modestes, les toits le plus souvent en tôle, les efforts d'embellissement très rares. Les constructions en ruines ou inachevées sont plus nombreuses que celles qui sont en état d'être habitées et les terrains vagues ne manquent pas, généralement occupés par une antique carcasse de voiture.

 

Isla Cedros, escale hors du temps
Isla Cedros, escale hors du temps
Isla Cedros, escale hors du temps
Nous ne savons pas ce qu'est ce "salon social".

Nous ne savons pas ce qu'est ce "salon social".

Isla Cedros, escale hors du temps
Peut-être la plus jolie rue du village

Peut-être la plus jolie rue du village

L'église, elle, est plutôt mignonne, et c'est l'heure du catéchisme ; six ou sept enfants sont installés sur les bancs pour faire quelques exercices et des coloriages. Je bavarde avec la dame qui les instruit. Ouf, je commence à me débrouiller suffisamment en espagnol pour faire un peu la causette. J'apprends qu'il y a plusieurs écoles à Cedros, de la maternelle au secondaire. Je vante la décoration de l'église, non pas qu'elle soit extraordinaire mais il faut bien être aimable. Du coup nous sommes invités à l'office de demain, c'est justement le jour des Rameaux. Moi qui suis curieuse, je serais presque tentée d'y venir, mais mon homme ne l'envisage pas une demi-seconde. Tant pis !

Isla Cedros, escale hors du temps
Même autour de l'église, la déco reste inachevée.

Même autour de l'église, la déco reste inachevée.

Isla Cedros, escale hors du temps

Contrairement à ce que nous avions vu le premier jour, il y a bien quelques commerces dont la façade est explicite : minimercado (oui, très mini, on s'en doute !) ou pharmacie, papeterie, coiffeur, boulangerie (enfin, panaderia, c'est ce que ça veut dire, mais à l'intérieur il n'y a pas de pain. Des gâteaux, oui, nous en achetons deux pour ne pas déranger inutilement la commerçante. Elle vend bien du pain, mais par grosses tranches, beurrées et sucrées, nous n'en prenons pas.) Tous ces petits commerces semblent dater d'une autre époque, mais enfin ils existent.

Isla Cedros, escale hors du temps
La boutique Internet !

La boutique Internet !

L'ancienne pharmacie, heureusement !

L'ancienne pharmacie, heureusement !

En passant devant une école, nous remarquons un petit panneau rouge : Internet para todos gratuito. J'essaie de me connecter, et ça marche ! Nous pouvons appeler les parents d'Éric, tout à côté d'une école secondaire, devant un vaste panorama en hauteur. Nous pourrons passer d'autres appels, et il y a des écoles moins éloignées que celle-ci.

 

Une école connectée à Internet par Starlink

Une école connectée à Internet par Starlink

Isla Cedros, escale hors du temps

Il y a aussi un petit restaurant, la Paceñita. Voilà notre deuxième rencontre à Cedros, qui va nous apporter beaucoup de plaisir. La jeune patronne de la Paceñita, Marlene, s'intéresse à notre histoire de voyage, elle s'applique à parler lentement pour que nous puissions la comprendre, elle est adorable. Au moment de choisir nos boissons, bonne surprise : pour la première fois depuis que j'ai appris le mot espagnol horchata, j'ai l'occasion d'en goûter. Théoriquement c'est de l'orgeat mais ça n'a rien à voir avec le sirop d'orgeat que nous trouvons en France. C'est un liquide épais, doux et laiteux, un peu trop sucré à mon goût mais les nombreux glaçons vont arranger ça en fondant. Nous grignotons nos nachos avec une délicieuse sauce qui rappelle un peu le tarama. Pendant qu'on prépare notre déjeuner, nous testons la connexion qui s'avère excellente. Tout autant que la cuisine de Marlene ! Avant ou après le déjeuner, je peux publier mon article de blog (le précédent). Une bonne chose de faite !

Mon filet de poisson et ses légumes d'accompagnement

Mon filet de poisson et ses légumes d'accompagnement

Marlene nous propose de revenir demain dimanche (alors que son restaurant est fermé) pour passer nos appels Whatsapp confortablement et aller faire une promenade avec son compagnon Justin et elle-même. Nous acceptons avec grand plaisir, surpris de tant de gentillesse.

Dans la nuit de samedi à dimanche le vent souffle fort, c'était prévu. Bien qu'abrité par le relief de la montagne, le port est agité de rafales dont certaines atteignent presque 30 nœuds. Éric a mouillé une bonne longueur de chaîne et le bateau tourne sur son ancre. Pas vraiment d'inquiétude mais nous ne dormons pas tellement, il faut quand même surveiller ce qui se passe.

Au matin, après cette courte nuit, nous allons rejoindre Justin et Marlene à la Paceñita. C'est plutôt amusant de bavarder avec nos filles car de temps à autre Marlene passe par là et leur fait un petit coucou ! Puis nous embarquons dans le pick-up, Marlene et moi nous tassons sur la banquette arrière mais Éric a de la place pour ses grandes jambes à l'avant. Quant aux trois chiens, qui attendent la balade avec impatience, ils sont à l'aise dans la benne.

La route, sur cette île, c'est surtout de la piste. Il y a un court passage bitumé (ou bétonné) mais la plupart du temps on comprend pourquoi tout le monde ici circule en 4x4. Cahots et poussière assurés ! Nos hôtes nous emmènent d'abord voir el Morro, la petite agglomération au sud de l'île, entièrement construite par l'entreprise de sel pour loger les travailleurs. À nos yeux la bourgade est bien fade, toutes les maisons sont identiques, alignées comme des parpaings, et ça ne donne pas envie d'y vivre. Cedros est moins morose. C'est à el Morro que se trouve le petit aéroport ; une piste unique et les plus gros avions peuvent transporter jusqu'à 15 passagers. Nous découvrons la côte de cette pointe sud, elle est rocheuse et la mer agitée. Nos hôtes nous emmènent maintenant pour ce qui semble être une habitude dominicale : acheter quelque chose à grignoter à une petite cabane près du terrain de football. (Le terrain de football, soit dit en passant, ne possède pas un brin d'herbe et les joueurs y soulèvent des nuages de terre rougeâtre sans que cela ne choque personne. Je ne voudrais pas avoir à laver les tenues...) Nous allons jusqu'à une plage où nous nous posons pour notre petit pique-nique. Les tostadas de ceviche sont délicieux ! Les trois chiens, quant à eux, se dégourdissent les pattes...

Isla Cedros, escale hors du temps
Isla Cedros, escale hors du temps

Pour finir l'après-midi, nous allons boire un café chez les parents de Marlene qui habitent une jolie maison en hauteur. Ah, ça existe donc quand même, les maisons en bon état, soignées, avec des pots de fleurs dans un petit jardin (sans herbe) et une terrasse d'où on voit très bien le port et l'Alki. Les parents de Marlene sont eux aussi très aimables et accueillants. Ils nous offrent même de rester dîner, mais nous déclinons, nous aurions vraiment le sentiment d'abuser... En revanche, nous proposons à Marlene et Justin, alors qu'ils nous ramènent au port, de venir passer un moment sur notre bateau. Ils ont l'air d'en être bien contents mais ce n'est cependant pas la première fois qu'ils montent à bord d'un voilier. Quand la journée prend fin je réalise que ça fait des heures que nous n'avons parlé qu'en espagnol, et tenu conversation sur des sujets variés. Nous avons fait de gros progrès dans la langue !

La maison bien entretenue des parents de Marlene

La maison bien entretenue des parents de Marlene

Lundi le temps est redevenu serein et nous allons faire une promenade dans les hauteurs de Cedros. Enfin, les hauteurs, c'est tout relatif. Nous grimpons sans doute jusqu'à 300m d'altitude, ce qui nous permet d'avoir un point de vue très vaste, mais nous sommes loin d'atteindre les sommets. La marche n'est pas difficile bien qu'il n'y ait pas de chemin tracé : la végétation est si rare ! Parmi la caillasse de couleur variée (du rouge brique, de l'ocre, du gris et même du violet !) poussent de chétives plantes grasses et parfois de grosses cactées se développent en buissons. Même si l'aridité du paysage peut sembler morne, nous sommes admiratifs devant la capacité des végétaux à survivre dans ces conditions hostiles. Cependant il y a de l'eau sur cette île, nous en avons la preuve en découvrant un réservoir alimenté par un gros tuyau : un captage en altitude l'alimente. Autour du réservoir, quelques arbres ont réussi à pousser. Une canalisation à la sortie du bassin se dirige vers le village en contrebas ; mais l'eau ainsi distribuée n'est peut-être pas destinée à l'alimentation.

Quand nous allons à terre, on remarque notre annexe !

Quand nous allons à terre, on remarque notre annexe !

 Nous dominons déjà le village et le port

Nous dominons déjà le village et le port

Le relief, visiblement creusé par des averses rares mais importantes...

Le relief, visiblement creusé par des averses rares mais importantes...

Isla Cedros, escale hors du temps
Le réservoir d'eau captée dans la montagne

Le réservoir d'eau captée dans la montagne

Éric, toujours prêt à monter plus haut

Éric, toujours prêt à monter plus haut

Isla Cedros, escale hors du temps
 Pour moi, nous avons suffisamment grimpé !

Pour moi, nous avons suffisamment grimpé !

Zoom sur le port en contrebas

Zoom sur le port en contrebas

Curieux arbre !

Curieux arbre !

Faut pas tomber dans les cactus !

Faut pas tomber dans les cactus !

Mercredi nous sommes invités à la fête d'anniversaire de Josefina, la maman de Marlene. Il s'agit d'un petit-déjeuner festif au restaurant la Paceñita auquel sont conviés les voisins et amis. Une assemblée modeste, mais c'est très divertissant. Outre le petit-déjeuner lui-même, sorte de brunch à la mexicaine, nous apprécions la conversation avec Lupe, la voisine de Marlene, et là encore nous constatons que la pratique de l'espagnol porte enfin ses fruits. Deux moments marquants de cette petite fête : la chanson d'anniversaire (Las Mañanitas) et la destruction de la piñata dans la cour. Tous les convives chantent (sauf nous, évidemment) et participent dans la bonne humeur. La fête commencée à 9h se termine vers 13h, sans que personne ne semble avoir autre chose à faire. Le temps prend une autre allure sur cette île, on dirait.

La carte d'invitation (envoyée par Whatsapp)

La carte d'invitation (envoyée par Whatsapp)

Marlene dispose le buffet de fruits

Marlene dispose le buffet de fruits

Isla Cedros, escale hors du temps
C'est Josefina qui a fait le gâteau.

C'est Josefina qui a fait le gâteau.

Marlene et ses parents

Marlene et ses parents

Justin (sur le mur) va hisser la  piñata

Justin (sur le mur) va hisser la piñata

Nous avons encore un barbecue au programme, et probablement un pot avec Vale sur notre bateau, alors qu'il ne nous reste plus que deux jours à passer ici. Nous n'avions jamais eu auparavant cette chance d'être accueillis par les gens du pays avec simplicité et gentillesse. Nous en sommes très heureux et cela rend cette escale exceptionnelle à nos yeux. Cedros, île si dépourvue d'attraits touristiques, a bien d'autres richesses en réserve. Est-ce comme pour les gens du Nord, qui ont dans le cœur le soleil qu'ils n'ont pas dehors ? Enfin, si, le soleil ici ils l'ont, mais on se comprend...

L'avis de coup de vent a entraîné la fermeture du port le week-end dernier. Aucun mouvement de barques de pêche ni de bateau d'aucune sorte n'a eu lieu depuis, bien que le temps soit absolument calme maintenant. C'est plus au large que le vent continue à souffler du nord, malheureusement pour nous. Éric s'inquiétait de voir le drapeau rouge rester en place, mais il vient d'être remplacé par un jaune, ce qui signifie que l'activité peut reprendre. Mais il ne se passe rien. Les pêcheurs ont-ils décidé de se mettre en congé pendant toute la semaine sainte ? Pour nous, le départ est prévu samedi matin, 30 Mars, direction Ensenada en direct. Nous devrions avoir du vent du sud, incroyable ! dû au passage d'une dépression à notre nord. Le temps ne sera sans doute pas beau, houle, nuages, pluie peut-être, mais que ne supporterions-nous pas pour pouvoir enfin naviguer à la voile ? Normalement, nous arriverons à Ensenada dans la nuit de dimanche à lundi, juste avant... une nouvelle période de vent contraire !

 

Toujours bon moral ! Mais sacrément besoin d'une coupe de cheveux...

Toujours bon moral ! Mais sacrément besoin d'une coupe de cheveux...

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F
Je note le petit clin d'oeil aux gens du Nord...<br /> Ces belles rencontres font chaud au coeur.
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Eh oui, j'ai pensé à toi aussi ;)
C
Ah c'est formidable ces rencontres et ces moments de fête!<br /> Dans trois semaines à peu près, on vous rejoint à San Francisco (ou dans les environs), on a hâte.<br /> A bientôt les amis et bon vent!<br /> Gros bisous
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Oui on a passé de très bons moments à Cedros... Comme quoi les escales sont parfois surprenantes, pour le pire ou pour le meilleur. Là on a eu le meilleur !<br /> Et nous nous hâtons autant que possible en direction des États-Unis. Nous aussi on a hâte d'y être ! A très bientôt !
P
Coupe de cheveux, coupe de cheveux, mais pas que !<br /> Les voyages comme on les aime…<br /> Bises, Pierre.
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Tu sais quoi, Pierre, on a réussi à trouver un coiffeur, à Ensenada où nous faisons une escale éclair. Eric est beau comme un astre ! Moi je garde ma tignasse jusqu'à voir...<br /> Bises à toi !